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mardi 21 février 2012

WickedPedia : Lilith

Mise à jour du 10.06.2013

Lilith (en hébreu : לילית) est le nom hébraïque et personnifié d'une créature démoniaque, "une sorte de démon-femelle", très populaire dans les anciennes  cultures du Moyen-Orient.

Elle était connue dans toute la Mésopotamie (Sumer, Accad, Ugarit, Babylone...) sous différents noms: lilitu, lilu, lili, 'ardat lili etc... Etymologiquement, il semble que ces noms tirent leur origine du sumérien lil, qui donnera notamment l'acadien lilu, synonyme de sharu ("vent") et zaqiqu ("souffle"). Lil, lilu signifient "souffle, ombre, esprit".

Ces divinités ou esprits représentaient généralement des vents orageux, mais s'appliquaient aussi à symboliser un caractère particulier du comportement sexuel chez la femme. Il semble établi que lilitu et ‘ardat lili symbolisent la femme sans mari, en quête permanente de satisfaction; parmi ses caractéristiques particulières, on notera que lilitu ne peut pas porter d'enfants; elle ne produit pas non plus de lait, mais du poison. Au fil du temps, par concomitance, il semble qu'il y ait eu assimilation entre Lilith et Lamashtu.

On considère souvent que la plus ancienne trace évoquant "Lilith" se trouve dans la douzième tablette d'une des versions de l'Epopée de Gilgamesh (env. -1700 av.J.-C.). Dans la partie intitulée Gilgameh, Enkidu et le séjour des Morts, un épisode met en scène la déesse Inanna - Ishtar, sauvant un petit arbuste (huluppu) qui s'était fait sauvagement attaqué par "le vent du Sud".
Inanna, la déesse, qui passait par là, le prit dans sa main et l'emporta en sa ville d'Uruk. [...] Des années passèrent et il finit par devenir grand. Mais lorsqu'Inanna voulu l'abattre, elle s'en trouva fort empêchée: le Serpent "qui ne connait pas de charme" avait fait son nid au pied de l'arbre, l'Oiseau "Imdugud" avait installé ses petits au sommet, et “ki-sikil lil-la” [nota] avait construit sa maison dans les branches. Ce que voyant, la jeune déesse, dont rien d'habitude n'altérait la gaieté, se mit à verser des larmes amères.” [nota]

Dans les cultures assyro-babyloniennes, lilu, lilitu et ‘ardat lili constituaient une sorte de trio démoniaque "nocturne"."Lilu et lilitu, sa femelle, sont l'incube et la succube, tandis que la "servante de Lilu", ‘ardat Lili, se choisit un fiancé parmi les hommes [qui sont] assez téméraires pour monter sur une terrasse un jour néfaste".


Sources:
  • Edouard Dhormes, Religions d'Assyrie et de Babylonie, PUF, collection MANA
  • Manfred Hutter, art. "Lilith", Dictionary of Deities and Demons in the Bible, 2nde édition revue et augmentée, Brill, 1999, p.520-521.
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En date du 14 juillet 2014, je constate que l'article de Wikipedia est toujours de mauvaise qualité. Je reporte ici les remarques que j'avais déjà faites il y a quelques temps.
Selon la Kabbale juive, Lilith (en hébreu : לילית) est, en Éden, la première femme et la première compagne d’Adam, avant Ève."

Il serait plus exact de parler de mythologie juive ou de la tradition rabbinique plutot que de kabbale juive. En effet, dans le principal corpus kabbalistique juif (le Sepher ha-Zohar) ce n'est pas le trait principal qui la caractérise; le passage évoquant Lilith (34b) en tant que première femme d'Adam ne fait que reprendre ce qui est affirmé dans l'Alphabet de Ben Sirach, tandis que toutes les autres évocations de Lilith font d'elle la parèdre de Samaël/Satan et reprennent les attributs largement répandus dans le Moyen-Orient ancien depuis Sumer (à savoir pour l'essentiel de hanter les songes des hommes, les incitant ainsi à la luxure, et de favoriser les grossesses problématiques).
Il s’agit peut-être du plus ancien mythe de révolte féminine."
En admettant que le texte de l'Alphabet de Ben Sirach remonte effectivement au VIIIème siècle comme cela est affirmé dans la discussion (mais c'est un point que je met en réserve), cette figure de la femme révoltée ne prend pas sa source dans la "Kabbale juive", mais bien dans les cultures polythéistes du Moyen-Orient. 
On peut retracer trois grandes origines au nom de Lilith.La première origine est sumérienne : ki-sikil lil-là signifie « la jeune femme aérienne » (soit ki-sikil « la jeune femme » et lil-là « aérien ») parce qu'elle vivait dans un arbre.
Qu'elle est la source pour ce point? Le sumérien LIL2 (-LA) signifie, selon le contexte, "vent, souffle, ombre, esprit", et donc par extension "fantôme" (source: Edouard Dhormes, Religions de Babylonie et d’Assyrie (collection Mana); Steve Tinney et Philip Jones, in Electronic Pennsylvania Sumerian Dictionary du Musée anthropologique et archéologique de l'Université de Pennsylvanie.). Le fait qu'elle ait sa demeure dans les branches de l'arbre d'Inanna peut éventuellement servir de connexion avec son caractère aérien, mais il est plus probable que ce soit le fait qu'elle prenne la fuite "par les airs" qui soit à mettre en rapport. Ce mythe d'Inanna constitue la plus ancienne origine connue du mythe, mais ce n'est pas nécessairement la première.
La seconde origine, l'akkadien lil-itu, est un emprunt du sumérien lil « vent » (1), et en particulier de NIN.LIL « Dame du vent », déesse du vent du Sud (et épouse d’Enlil), auquel est accolé le mot itud « lune »."
Il est communément admis que l'hébreu lilit vient de l'akkadien lilitu, créature formant avec lilu et 'ardat lili un trio démoniaque qui n'est en rien comparable à Enlil et son épouse, en dépît de la proximité des attributs. (source: Edouard Dhromes, op.cit.; Manfred Hutter, in Dictionary of Deities and Demons in the Bible, 2nde édition revue et augmentée, Brill, 1999, p.520-521, art. “Lilith”).
La troisième origine est hébraïque, mais ici, deux hypothèses coexistent.
laïla « la nuit »;
lou'a « la gueule ».
Aucune de ces deux hypothèses ne tient la route. Il est plus vraisemblable de considérer que l'hébreu layla tire son origine du nom de la divinité sumérienne Lel, même si "l'identification d’une déité Lel dans le monde ouest-sémitique est un sujet très difficile pour l’historien des religions" (Emile Puech,Dictionary of Deities and Demons in the Bible, 2nde édition revue et augmentée, Brill, 1999, p.508-511, art "Lel"). Le nom en question a été recensé entre autres à Mari, Ougarit et Canaan. Si dans la Bible, les entités de type cosmogonique ont été démythologisées, une divinité de la Nuit comme contre-partie du Jour, Yawm, est attestée dans le monde araméen depuis au moins le VIIIème avant JC., comparable à la Nyx des Grecs (cf. KAI 222 A 12).
Ainsi, le mot hébreu לילית, Lilit, qui prend en akkadien la forme Līlītu,
C'est l'akkadien lilitu qui prend en hébreu la forme lilit et non pas l'inverse !
...est un prénom féminin de racine proto-sémitique LYL « Nuit », qui signifie littéralement « la femme de la nuit » ou « démon ». Toutefois, sur des inscriptions cunéiformes, Lilit et Līlītu font référence à des esprits du vent apportant la maladie1, (2).

A modifier ou supprimer compte tenu de ce que j'ai relaté au sujet de la confusion entre lil et Lel.

Par ailleurs, on se doit de préciser que Lilith est un nom propre tiré de l'expression générique lili, comme l'atteste le texte du Grand Rouleau d'Isaïe qui porte, au même endroit (34:14) l'expression liliouth, littéramment les lilis, qui étaient ces "souffles mauvais" très connus dans tout le folklore du Moyen-Orient, croyance attestée par de nombreux documents à caractère magique (incantations, talismans, etc) et repris dans la tradition rabbinique. Le nom propre a été construit sur une expression commune.

2 commentaires:

  1. Primary publication Gilg 46, N 1452
    Author(s) Shaffer, Aaron
    Publication date
    Secondary publication(s) mus.photo 55657-58
    Collection University of Pennsylvania Museum of Archaeology and Anthropology, Philadelphia, Pennsylvania, USA
    Museum no. N 1452

    Period Old Babylonian (ca. 1900-1600 BC)

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  2. Extrait de l'article "Night" du Dictionary of Deities and Demons in the Bible" (p.623)

    Night. I. Heb laylâ is based on a common Semitic vocable for 'night'; cf. Ug; ll, Old South Ar. ll, Canaanite l[el]a (EA 243:13), Ar lail(at), Akk liliatu ('evening'); The term is not used in the formation of personal names in East or West Semitic onomastica, Outside the Hebrew Bible, 'night' is somtimes ascribed divine status.

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